Mécanique, observation et expérimentation
Je ne suis pas une passionnée de technique photographique, sans pour autant dire que cela ne m’intéresse pas. Les appareils photos–boîtes d’allumettes que j’ai fabriqués sont une réduction des techniques possibles de l’appareil et un retour à l’état brut de la photographie : Une percée de lumière empreinte sur un papier dont la chimie capture cette même lumière.
L’approche est très différente d’un appareil photo que l’on a bien en main ; souvent lourd, on le place devant son œil, c’est la capture par le regard. Avec une matchbox, tout cela disparaît pour laisser place à une position immobile, l’objet dans les mains. Pas de viseur. Ne surtout pas bouger, ou mieux : trouver un appui. Tout se joue dans le soulèvement de la languette, celle qui cache le trou d’aiguille. Retenir son souffle, ne pas prêter attention aux passants qui m’interrogent du regard. Silence. Pas de clic. L’image s’est déposée. Il faut maintenant tourner la pellicule. La boîte d’allumette sur l’oreille, à l’aide d’une clé ou d’une tige de métal, écouter le bruit de la pellicule qui avance en comptant les petits clics.
J’aime photographier des lieux ou des objets de notre monde contemporain. Faire disparaître l’être humain. Ne laisser apparaître que sa présence. Accentuée par l’image floue, parfois légèrement déformée et couverte de tâches de lumière, l’impression que veulent donner ces images est celle d’un rêve d’un autre monde, d’une réalité différente où ce qui nous entoure ne serait plus que le souvenir d’un temps perdu.